Souvenirs d'enfance de Robert GUIRAUD

     Enfant, j’aimais inventer et me raconter des histoires, écrire des poèmes. J’imaginais que plus grand, je pourrais mettre dans un roman tout ce que je ressentais dans le but de sauver de l’oubli ces sensations merveilleuses ou tristes que procure la vie.

     Je suis né à Dio le 10 octobre 1944 et j’ai longtemps cherché l’heure de ma naissance pour pouvoir déterminer l’ascendant de mon signe zodiacal : la balance. Après le décès de ma mère, j’ai cru que je n’arriverais jamais à retrouver l’information, d’autant plus que mon père ne s’en souvenait pas. Plus tard, j’ai découvert, à la mairie de Valquières, où ma naissance a été déclarée, que mon arrivée au monde s’est produite à 4h du matin. D’après le calcul automatique qui tient compte du moment (date et heure) et du lieu (commune), proposé par plusieurs sites Web pour calculer la position des astres à la naissance, il semble que je sois ascendant Vierge. J’ai toujours été curieux et attiré par le paranormal.

     Si j’évoque ici ce goût pour les sciences ésotériques, c’est que je le crois intimement lié à mon envie d’écrire, ou plus précisément, au besoin de comprendre et de partager. C’est sans doute la raison qui m’a conduit, en ce début d’hiver 2013, à rechercher dans mon passé ce qui devait être sauvé de l’oubli pour diverses raisons. J’entre lentement mais sûrement dans la période du bilan où il devient important, sinon urgent, de recenser, classer, analyser, interpréter le vécu. Même si un demi-siècle reste une période courte pour l’humanité, force est de constater des évolutions irréversibles dans les comportements, les valeurs, les modes de vie. Il m’a semblé intéressant de noter ces changements à l’occasion de petites anecdotes racontées comme des scènes de la vie quotidienne. Une autre raison de me livrer à cet inventaire est certainement liée à mon désir de dire à mes proches qui j’ai été et donc qui je suis, ce qui m’a marqué, comment je me suis construit. Il nous arrive souvent de rabâcher les mêmes histoires qui finissent par lasser nos enfants et on oublie, presque involontairement, de leur raconter l’essentiel constitué d’une multitude d’évènements qui nous ont marqués, façonnés, attendris ou révoltés. Il arrive aussi que notre conscience, par paresse ou confort, relègue aux oubliettes certains souvenirs un peu sensibles. Est-ce par peur de réveiller quelques vieilles douleurs mal guéries ? Il faut se rendre à l’évidence notre descendance est privée « d’historique ».

     Dès les premiers chapitres écrits, j’ai ressenti le besoin de les lire à mon entourage mais aussi aux personnes qui ont vécu ces moments de mon enfance avec leur différence d’âge et de perception. Ce fut une découverte ou presque de constater à quel point la mémoire est sélective, partiale, incomplète, quelquefois imprécise parfois même faussée. Pour rester dans le cadre de mon projet j’ai donc décrit le plus fidèlement possible mes propres souvenirs en les complétant par des notes en annexe dans un souci d’exhaustivité et d’objectivité. Ces notes regroupent les informations glanées au cours des rencontres avec des Caunassiens souvent plus âgés que moi. J’ai donc ainsi essayé de rester fidèle à moi-même sans perdre le point de vue des autres témoins.
Après cette explication, il devient presque superflu de préciser que je n’ai pas cherché à écrire « L’histoire de Caunas », même si cette idée m’a parfois tenté. Conscient de mes capacités, mon but n’a jamais été de faire un travail d’historien destiné à collectionner des informations objectives et historiques sur notre village. Cependant, comme je l’ai évoqué précédemment, certaines anecdotes sont imprégnées d’un environnement révolu et peuvent, à ce titre, constituer un témoignage du passé.

     Voilà résumé l’essentiel du « comment » et du « pourquoi » j’ai démarré ce travail de mémoire, un tantinet narcissique, un peu cabot et surtout débordant d’orgueil depuis que mes amis de Meys me taquinent, et ne tarissent pas d’éloges sur mon style d’écriture.

     Avant de feuilleter les images un peu jaunies de mon enfance, je ne résiste pas au plaisir de citer ces quelques vers extraits du poème « Le lac » d’Alphonse de Lamartine :



« Ô temps ! suspends ton vol, et vous, heures propices !
suspendez votre cours :
Laissez-nous savourer les rapides délices
Des plus beaux de nos jours »

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"Les Lunassiens racontent Lunas..."