Canonnier du régiment
de Lafère en 1790 |
Sous
le Second Empire, un Lunassien, Jean-Baptiste Gras est décoré de la médaille
de Saint Hélène, ordre institué par Napoléon III pour honorer les 405 000
compagnons de gloire de son oncle, Napoléon 1er, encore vivants en 1857.
Jean-Baptiste Gras est né le 9 juin 1787. Son père, Jean, est cultivateur.
Le 16 juillet 1792, au décès de sa mère Angélique Fournol, il n’a que 5 ans.
Le 1er février 1807, à 19 ans, il est incorporé au 4e régiment d’artillerie
à pied, dans la dixième compagnie. Il y servira jusqu’au 20 octobre 1815.
Divers documents permettent de suivre l’évolution de sa carrière militaire :
- le 1er janvier 1810 il obtient la qualification d’artificier * ;
- le 11 mars 1813 il est nommé caporal ;
- le 1er mai 1813 il devient fourrier ** ;
- en novembre, il accède au grade de sergent ;
- en 1809 il participe à la campagne d’Autriche ;
- en 1810 à celle du Tyrol ;
- en 1812 à la campagne de Russie et se trouve à la bataille de Bauske
(aujourd’hui Bauska en Lettonie), l’un des points de transit de l’armée
napoléonienne en route pour Moscou ;
- en 1813, il effectue la campagne de Saxe (ou d’Allemagne) engagée contre
la Sixième Coalition (Royaume-Uni de Grande-Bretagne, Empire russe, Royaume
de Prusse, Suède, Empire d’Autriche…)… On le retrouve : le 2 mai à Lutzen,
les 20 et 21 mai à Bautzen où l’Empire remporte deux nettes victoires sur
les forces russo-prussiennes, les 26 et 27 août à Dresde (nouvelle victoire
sur une armée formée d’Autrichiens, de Russes et de Prussiens), du 16 au 19
octobre 1813 à Leipzig (dite bataille des Nations où 400 000 ennemis
affrontent et battent la plus grande armée française jamais engagée sur le
terrain : plus de 200 000 hommes réunis sous le commandement de Napoléon),
les 30 et 31 octobre 1813 à Hannau (l’armée française, dans sa retraite,
résiste à une attaque austro-bavaroise) ;
- en 1814, il participe à la campagne de France qui aboutira à la déchéance
de l’empereur et à son exil à l’île d’Elbe ;
- une attestation établie le 24 juillet 1814 mentionne que, suite à la mort
du sieur Bergeret, Jean-Baptiste Gras tient la place de garde d’artillerie
de Thionville (alors en état de siège) du 25 février au 7 mai. Ce jour,
arrive le sieur Lemaître nommé par intérim à cet emploi. Le général Hugo,
père du poète, commandant supérieur à Thionville, lui attribue pour cette
charge la somme de 85 francs et 75 centimes prélevée sur les fonds affectés
aux dépenses de l’artillerie (la ville se rend aux Prussiens le 22 juillet
1814) ;
- le 20 octobre 1815 il est licencié puis dirigé
vers la légion du département de l’Hérault *** qu’il intègre le 9 novembre
1815. Jean-Baptiste Gras y servira jusqu’au 26 juin 1816 date à laquelle il
rejoint la 9e compagnie du régiment d’artillerie à pied de Lafère, cantonné
dans l’Aisne.
* personne gérant et délivrant les munitions.
** sous-officier chargé de l’intendance. Ce terme vient de fourrage.
*** La légion départementale créée par Louis XVIII (ordonnance du 3 août
1815), en remplacement des anciens régiments dissous, était composée des
soldats de toutes les armées rentrés dans leurs foyers. Des conseils
spéciaux y étaient chargés de déterminer si ces militaires pouvaient « être
admis à l’honneur de servir le roi ou être admis en congé de réforme ou
absolu ». |
Le 11 août 1817, suite à la décision ministérielle du 17 juillet, il obtient
son congé absolu. Sur son certificat, outre ses états de services on peut
lire « s’est toujours comporté en brave et honnête militaire et n’a pas
contracté d’acte de mariage depuis qu’il fait partie du régiment ».
Ce sera donc, après 10 ans d’absence et des milliers de kilomètres parcourus
à travers l’Europe, le retour vers son village natal. Sur la feuille de
route délivrée à sa libération, il est indiqué qu’il a droit, sur son
trajet, au logement et à l’intendance dans des gîtes désignés et qu’il a
reçu une somme de 75 cent. pour aller jusqu’à Laon. Annotations et cachets
apposés sur le document révèlent son passage à Châlons-sur-Marne, Troyes,
Bar-sur-Seine, Châtillon-sur-Seine, Lyon, Valence le 22 août et Nîmes le 25.
Une description physique de ce soldat est également donnée : taille 1mètre
et 720 millimètres, cheveux et sourcils bruns, yeux roux, front ordinaire,
nez épaté retroussé, bouche moyenne, menton fourchu, visage rond. |
Le 20 novembre 1819, à Lavalette, il épouse Sophie Durand (1793-1857). Le
couple s’installe à Lunas. Le recensement de 1836 précise qu’ils tiennent
une auberge à l’entrée ouest du village, avec leurs 5 enfants. Il fut
désigné maire de 1823 à 1836 et en 1848.
Jean-Baptiste Gras, décède le 13 septembre 1859 à Lunas. Il avait 72 ans.
La descendance de Jean-Baptiste Gras :
- Isidore Gras, né le 20 février 1821 et qui se fait appeler Jean-Baptiste
(en tant que fils aîné), épouse en 1848, Marie Raunier (fille d’un
aubergiste) à Clermont l’Hérault. Il y exerce la profession de roulier ;
- Anne, Sophie Gras née le 22 décembre 1822, se marie en 1844 à Jean Antoine
Descouts, cultivateur à Lodève ;
- Antoine, Auguste, Édouard Gras né le 24 janvier 1829, roulier, marié à
Virginie Philomène Fulcrand en 1860, meurt le 28 août 1862 laissant une
orpheline, Victoire, âgée de 1 an ;
- Rose, Philippine, Bernardine Gras, née le 19 juillet 1831, épouse en 1860
Émilien Rivière, marchand. C’est le frère de Marie-Rose Rivière qui se fit
remarquer en 1845 par son acte de courage (voir l’article
consacré à Rivière
Marie-Rose). Ce couple, qui aura 4 enfants, reprend l’auberge paternelle;
- Eugénie, Appolonie Gras née le 22 décembre 1833, épouse en 1853 Louis
Alliès marchand de faïences à Clermont l’Hérault. En 1876 on les retrouve,
avec 3 enfants, cafetiers à Lunas.
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