Paul Combès dit "Paulou" |
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Mon tout premier souvenir, je le dois à Paul Combés. Ce célibataire endurci devait avoir la trentaine quand nous habitions la première maison de la rue principale de Caunas, à l’angle de la route de Lunas à Dio. Ce Paul, qui vivait seul, était notre voisin de palier. Il travaillait, comme la moitié des hommes adultes du village, à la mine de charbon du Bousquet-d’Orb. Avec sa corpulence imposante, son caractère rustre et sa grosse voix, il faisait peur aux enfants du village. Moi, du haut de mes 4 ans, je l’avais apprivoisé, je courais me jeter dans ses bras lorsque je l’apercevais. Alors il m’attrapait, sans plus d’effort que pour mettre son béret noir qu’il portait tout le temps sur la tête. Il me juchait sur ses larges épaules, à califourchon. Quand j’écris ces lignes j’entends encore son rire saccadé qui montait du fond de sa gorge de mineur, abîmée par la silicose. Je revois aussi ses yeux qui se plissaient de plaisir quand il s’adressait à moi en adoucissant sa voix par crainte de m’effrayer. Paulou, comme on l’appelait, a mis un terme à sa vie, peut-être par désespérance ou overdose de solitude, en se passant une corde autour du cou. |
Notre maison avant 1948. A l’angle de la rue et de la route. L’habitation se limitait à une cave au rez-de-chaussée, une pièce à vivre au 1er étage et la chambre sous le toit. |